5 raisons de lire Carlos Zanón

Carlos Zanon

Le dernier roman de Carlos Zanón, Taxi, nous a donné envie de parler de cet auteur espagnol, et surtout, de le faire parler de ses livres. Avec plus ou moins de succès…

C’est une première pour Milieu Hostile : le « 5 raisons de » entre deux portes… Plus sérieusement, Carlos Zanón devait être pressé ce jour-là car ses réponses sont très laconiques. Si laconiques que nous allons devoir vous redire à quel point il faut lire Carlos Zanón. Si laconiques que nous allons être obligés de vous vanter ses romans. Gage de qualité, ces quatre romans sont publiés chez Asphalte, et, one more time, bravo pour ce travail.

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Barcelone

Carlos Zanón, donc. Quatre romans, un point commun : Barcelone.
Il s’en explique brièvement et on pourrait croire que c’est anodin. Il n’en est rien. La ville hante ses livres. Pas comme chez l’immense Francisco González Ledesma, qui réussissait à imbriquer l’histoire de la ville dans ses romans. Mais à sa manière, en décrivant Barcelone à travers le regard de ses habitants. La ville incarnée par les gens qui y vivent.

« Je ne l’aime ni ne la déteste. C’est le lieu où je vis, où je sais comment fonctionnent les choses, les codes de la ville. »

Roman noir et poésie

Zanón a commencé par la poésie avant de se consacrer au roman noir et ses quatre romans sont quatre variations autour du roman noir.

« C’est un regard. Pessimiste, dans un monde sans Dieu mais avec la foi qu’au tour suivant, tes cartes seront bonnes. Un certain déterminisme. La métropole comme lieu de la solitude et l’anonymat, la liberté et l’indifférence.

J’écris de la poésie depuis que je suis gamin. La poésie te choisit et t’abandonne. Tu ne peux rien faire pour la forcer. La poésie est un choc de mots, tu n’as pas besoin d’intrigue ou de vraisemblance. Dans le récit, si. »

Carlos Zanon - Soudain trop tardSoudain trop tard

Soudain trop tard, le premier roman paru de l’auteur, est sec comme les coups de marteaux qui ouvrent le livre. Il n’est pas dans les codes du genre, ce qui a pu dérouter certains lecteurs, mais c’est un beau portrait de personnages et une vision de Barcelone loin des jolies cartes postales.

« Pour ne pas parler de moi, je cherchais un point de départ radicalement opposé. Deux amis entrent dans un bar et l’un assassine l’autre. Comment et pourquoi ? Je voulais que ce soit un roman choral, de quartier. »

N’appelle pas à la maison

« Je voulais faire le lien entre le roman picaresque, genre très espagnol, avec une intrigue noire à la McCain. »

N’appelle pas à la maison est un pur roman noir. Zanón nous l’avait confié lors de la sortie de Soudain trop tard, « Le second sera pur jus ». Pas de flics, pas d’enquêtes, mais un étrange trio dans un excellent roman choral, noir et âpre.

J’ai été Johnny Thunders

J’ai été Johnny Thunders est tout aussi puissant. Il a d’ailleurs reçu le Prix Dashiell Hammett 2015 du meilleur roman noir de langue espagnole. Zanón réussit le tour de force de construire une histoire avec des personnages pour lesquels vous n’avez aucune empathie. Le temps passe, les gens vieillissent, la nostalgie s’enfuit, les illusions ne perdurent pas…

« T.S. Eliot a dit que plus la poésie s’éloignait de la musique, plus elle s’éloignait de la poésie. L’intuition, le rythme, la puissance. Les mots sonnent. »

johnny-thundersJ'ai été Johnny Thunders - Carlos Zanon

Taxi

« Un artiste doit être en guerre contre lui-même, contre ce qu’il a accompli. Essayer de faire de nouvelles choses. Savoir quelles sont ses limites. »

Taxi, qui nous fait penser que nous devrions faire un Top 5 Taxi (les confessions dans le taxi de Et le verbe s’est fait chair, Stan Murch sans qui les aventures de Dortmunder ne seraient pas entièrement les aventures de Dortmunder, Arrêtez-moi là de Iain Levison et certainement Taxi, Take off and Landing, où il n’est pas question de taxi, mais quelle rigolade). C’est une errance barcelonaise, qui rompt avec ce que l’auteur a fait précédemment. On y sent de la nostalgie, Sandrino fuit ses responsabilités conjugales et arpente la ville, au volant de son taxi.

Merci à Claire Duvivier pour la traduction.

Pour aller plus loin

Carlos Zanón chez Asphalte, son éditeur
L’interview de l’auteur par Christophe Dupuis pour la sortie de Soudain trop tard